J’ai écrit des notes de voyage sur une période d’un an. Cela a produit ce livre qui part maintenant à la rencontre de ses lecteurs. Ces notes sont devenues un carnet que j’ai vite oublié sur une étagère. À la recherche d’un autre ouvrage, je l’ai retrouvé en compagnie d’un autre manuscrit relatant une année vouée au Dokkodo de Musashi. J’ai retravaillé la forme, débusqué les fautes, demandé à des amis et à des connaissances de le lire pour me ensuite faire des suggestions.

L’étape d’après a été d’en faire un objet. Mon élève Valérie de Berardinis, artiste peintre et graphiste, l’a pris en main et lui a fait parcourir le processus de la MAP, la mise en page. Cela a abouti à un fichier à imprimer. La typologie, la taille des marges, la couverture, la place des notes de bas de page, tout a passé l’épreuve des validations successives.

Il me fallut parallèlement chercher un imprimeur. Je le trouvai par le biais d’Angeline Leroux et son beau livre photographique « Cosmosgonie ». Je pris contact avec Christophe Bonnet de La Gutenberg à Tulle. J’eus la chance de rencontrer un imprimeur passionné par le livre d’art et de poésie, à l’écoute de la fantaisie d’un auteur pour mieux la rendre réalisable.

Puis enfin, l’attente de la livraison me saisit. Dans un jour, au plus deux, les cartons seront sur le pas de la porte. Déjà les ventes ont lieu. Quelques cafouillages ont été réglées sur les moyens de paiement. Les enveloppes à bulles sont prêtes, adressées, attendant l’objet finalisé.

J’avais eu des contacts avec des maisons d’édition mais deux raisons ont fait que j’opte pour l’auto-édition. La durée du processus d’édition ne m’assurait pas la mise à disposition du livre avant la fin d’année 2021. L’aspect multidimensionnel de mon texte répondant à une caractéristique essentielle de l’art de Noro Masamichi senseï ne permettait pas au livre d’entrer dans une collection ni dans la ligne éditrice d’une maison d’édition. Une dernière raison cachée à ma vue était simplement mon caractère farouchement indépendant, voire un penchant autonomiste. J’ai, à un moment donné, compris que je m’orientais vers l’auto-édition.

Depuis la création de l’objet, j’ai le sentiment que j’aurais pu faire mieux, plus et autrement. Alors, comme dans la pratique, comme au dojo, j’apprends à lâcher et à quitter l’ouvrage, à passer à autre chose, sans regret. Je reçois les premières demandes et avec étonnement, je relis mes notes de voyage avec le regard de l’Autre, comme par-dessus son épaule. Maintenant, j’attends sa réaction, les critiques, les échanges. Une nouvelle étape.