« Le Maître, au début, l’uchideshi l’appelait « Monsieur », il ne pouvait pas dire « senseï » car il ne le connaissait pas encore, pas véritablement, pas depuis le cœur même de la pratique. Puis un jour, Noro senseï lui fit signe. L’élève se leva et alla au-devant de Noro senseï, au milieu, devant les autres élèves. J’imagine que ce devait être Shiho Nage. À peine l’élève eut-il saisi le poignet du maître qu’il était ailleurs, en haut, à trois mètres, puis déjà au sol, le souffle coupé par le choc de l’arrivée sur le tatami. Il avait été projeté, soulevé, aspiré. De cette découverte, de cette expérience concrète du souffle du Maître, dès cette minute, il le nomma « Senseï ». Des autres senseïs japonais, il rencontra la force. De Noro senseï, il conçut la puissance. Noro senseï était à cet égard unique, sans pareil. De ce jour, il fut régulièrement lancé à travers le tatami et parfois reçu durement au sol. Il eut des moments où il ne put se relever tant son maître avait été vif. » Le voyage d’un maître, entre Ciel et Terre, pp.221-222