« La contradiction est le propre de l’homme. »

C’est avec ces mots qu’un jour, j’ai répondu à la question de savoir si mes aspirations n’étaient pas contradictoires. Pour l’Aïkido, la contradiction réside dans la notion d’art martial de paix ou pacifique. Je considère que cette contradiction est fertile dans la mesure où le pratiquant accomplit de multiples itérations entre ces pôles que sont le martial et le pacifique avant d’aboutir au fruit qu’est le civil. En opposant le martial au pacifique, on réalise une contradiction qui n’en est pas une réellement. Le martial s’oppose au civil et le pacifique s’oppose au conflictuel. Choisir ses mots avec précision est un impératif si on désire penser clairement et agir avec bénéfice.

Si le martial maintient le cap sur le pacifique, il peut espérer servir le civil.

S’il se repaît du conflictuel, il ne sait lui trouver une issue et se condamne à une errance perpétuelle.

Si le civil élude la case martiale, espérant échapper au conflit, il s’épuise et s’abîme dans la faiblesse, pavant la voie à une soumission répétée.

Comprendre l’espace civil nous pousse à aborder ce qui se situe à sa clôture, à examiner l’osmose entre les solutions civiles et martiales.

Ce mouvement naît de l’épuisement du langage, quand les mots sont éreintés au degré où la parole n’est plus que fiel et poison et qu’elle ne possède guère plus de crédit.

Ce moment venu, les hommes se toisent en chiens de faïence, réduits au silence et prêts à mordre. La parole est tarie, le texte se délite, le contrat humain s’effrite. Advient le temps du poing et du bâton.

Aux époques où règne la violence, certains ont su garder espoir et ont maintenu qu’un humain peut se tenir debout devant un autre, qu’une articulation des volontés existe quand bien même le premier se voudrait un mur pour son second.

Le voyage d’un maître, entre Ciel et Terre, p122-123